28/09/2022
Je reçois ce jour la réponse de la DGCCRF au courrier que j’ai adressé le 5 avril 2022.
Je le partage sans tarder, accompagné d’une analyse en première approche. Pour ce faire, je recopie celles des questions que j’adressais dans mon mail d’avril auxquelles semblent répondre les différents paragraphes de la lettre de la DGCCRF.
Je procèderai dans une deuxième étape à une analyse plus précise des articles du code de la consommation qui sont cités dans la dernière partie du courrier.
« Question 1 : Quel est le statut légal des « limites spécifiques » figurant dans la note MCDA n°2 au sujet de la migration de plomb et cadmium sur la zone de contact buccal, ainsi que de la migration d’aluminium, arsenic et cobalt ? S’agit-il de recommandations ou s’agit-il d’obligations légales auxquelles toute entreprise établie en France et mettant en vente des articles céramiques destinés à un usage alimentaire est soumise ? »
Le courrier utilise sans doute possible la terminologie « recommandations » à 2 reprises, précisant même le contexte, à savoir que l’organe les définit « pour aider [les opérateurs] à apprécier les risques relatifs à la migration de substances qui ne font pas l’objet de limites maximales réglementaires ».
Le courrier indique en dernière ligne de la page 1 « Ces exigences d’inertie s’appliqueront ainsi à tous les opérateurs mettant des produits sur le marché français ».
Dans le contexte du paragraphe, on se demande si « Ces exigences» renvoie aux « recommandations » de la DGCCRF. Or « exigences » et « recommandations » n’ont pas la même portée donc cela semble peu probable à la lecture de ce qui précède.
Il semble plus cohérent que le vocable « Ces exigences » fasse référence à « Ce principe d’inertie » (groupe nominal clôturant la phrase précédente). Il s’agirait donc ici d’une référence à l’article 3 du règlement cadre 1935/2004 qui, lui, s’applique de plein droit sur tout le territoire de l’Union. Et là on est complètement d’accord.
Quel dommage toutefois de réintroduire ainsi une confusion. On s’interroge aussi sur l’usage du futur simple (« s’appliqueront » au lieu de s’appliquent »).
NB : il y a une erreur dans la référence donnée par la DGCCRF en note de bas de page 1. Ce qui est cité est un extrait de l’article 3 du règlement n°1935/2004 et non « 1935/2006 ». L’agent de la DGCCRF semble faire ici une confusion avec l’autre règlement en vigueur concernant les MCDA et qui date effectivement de 2006 mais qui est référencé n° 2023/2006.
« Question 3 : s’agit-il d’obligations légales pour lesquelles la seule preuve de conformité acceptée est un certificat établi à la suite d’une mesure en laboratoire ? »
Le courrier de la DGCCRF donne des éléments de réponse très clairs et celà nous convient bien.
Il est ainsi indiqué que « les opérateurs peuvent faire réaliser des analyses, de migration des métaux par exemple, des calculs de modélisation. Il est également possible de s’appuyer sur la documentation fournie par le fournisseur des matières premières (…) afin d’établir une analyse des risques ».
Cette réponse est par ailleurs cohérente avec les exigences de traçabilité portées par le règlement cadre 1935/2004 et les exigences de bonne pratiques de fabrication qu’il convient de documenter en application du règlement 2023/2006. Malheureusement en pratique, en cas de contrôle, les agents DGCCRF demandent ces documents mais ne disposent pas des compétences pour les analyser. Immanquablement ils reportent donc leurs exigences sur les certificats de laboratoire.
Ce point de mon argumentation dans le courrier du 05/04/22 trouve donc ici une réponse satisfaisante et nous disposons enfin d’un document nous permettant de contester l’exigence de certificat de laboratoire pour prouver l’inertie plomb/cadmium sur la zone de contact buccal et l’inertie arsenic, aluminium, cobalt sur l’intérieur de la pièce.
Plutôt que de devoir payer des frais de laboratoire élevés pour des tests inutiles dans bien des situations*, il est donc de notre ressort de maîtriser ce que l’on fait en produisant une céramique alimentaire :
- Savoir ce que l’on introduit dans sa composition,
- Établir si les composants sont susceptibles de « présenter un danger pour la santé humaine » (art. 3 règlement 1935/2004) en cas de migration,
- Déterminer si la formulation chimique des décors est cohérente avec la température de cuisson et permet de garantir avec un bon niveau de confiance stabilité dans le temps et résistance dans les conditions de vie usuelles de la vaisselle (attaques acides, basiques, chocs thermiques, chocs mécanique ».
Cette montée en compétences de la profession est une nécessité.
Pour conclure, on constate en comparant la liste des questions que j’avais adressées et les formulations apportées dans la réponse de la DGCCRF, que tout ne semble pas avoir été traité, des zones d’ombre persistent. Je reprendrai le sujet prochainement pour compléter l’analyse du courrier. Quoi qu’il en soit, je suis déjà très heureuse d’avoir reçu cette réponse. Un pas a vraiment été franchi.
(*) à titre d’illustration je ne fais entrer ni plomb ni cadmium (ni quantité d’autres composants) dans mes articles alimentaires. Par ailleurs je documente précisément la composition des argiles que j’utilise, la composition et la formulation chimique des glaçures que j’applique etc. Il est donc très agaçant de devoir payer un laboratoire pour valider ce que j’écris dans mes notices. Je le fais néanmoins car la directive de 1984 est claire sur le sujet plomb/cadmium à l’intérieur de la pièce. Ainsi même si je conteste les modalités de contrôle des « limites spécifiques » de la DGCCRF, je me conforme en revanche aux exigences des textes européens qui sont eux incontestables. Celà constitue déjà une dépense inutile au sens où elle ne m’apprend rien ; je suis donc rassurée de lire dans la réponse de la DGCCRF que je suis fondée à ne pas faire procéder aux tests aluminium/arsenic/cobalt à l’intérieur de la pièce, ni aux tests plomb/cadmium sur la zone de contact buccal dès lors que je document correctement ce que contient ma pièce et comment je procède.